« Une femme ? Non mais vous rigolez ? Rentre à la maison faire le ménage ma belle, c’est pas pour toi ici
- On verra ce que tu diras quand je t’aurais tant botté le cul et que tu pleureras comme une fillette dans les jupes de sa mère !»Autant dire que ne pas se laisser marcher sur les pieds est la base pour une femme qui désire exercer un métier d’homme. Seule femme de la promotion, autant dire que les vingt-et-une semaines de formation pour devenir un membre du SWAT on put paraître longues et pénibles pour Juliane. Mais la jeune femme faisait preuve d’une détermination et d’une envie de réussir qui lui ont permis de tenir le choc. Physiquement inférieure aux armoires à glace qui étaient ses potes de chambrée, la blonde a peiné sur les exercices de renforcement musculaire mais petit à petit, elle a semblé avoir sa place dans l’équipe. Le macho du premier jour est venu la voir un soir où elle avait fait une mauvaise chute sur le genou pendant un exercice d’assaut à cause de lui.
« Hey…
- Dean ? Qu’est-ce que tu fais là ?
- Je suis venu voir si ça allait
- Je dois avouer que je ne te suis pas bien, tu es le premier à dire qu’une femme n’a pas sa place dans les rangs du SWAT et tu viens me voir à l’infirmerie pour savoir comment je vais… Fais attention Dean, je pourrais croire que tu t’inquiètes un tant soit peu pour moi ! »
Le gros bras semblait embarrassé. Étonnant de sa part quand on le connaissait bien.
« Okay… Je l’avais mérité celle là.
- Ouaip !
- On sait tous les deux que c’est à cause de moi que t’es là, j’ai pas assuré et je voulais te présenter mes excuses »
Juliane hésita entre poursuivre sur de l’ironie ou un ton plus sérieux. Elle jugea qu’en ces circonstances, peut-être qu’elle devait se montrer diplomate et moins sur la défensive.
« ça aurait pu arriver à n’importe qui tu sais, on n’est pas encore des pros, on se rapproche de l’objectif. Il paraît que c’est en faisant des erreurs qu’on apprend. Il est regrettable que ça me soit arrivé mais je suis convaincue que maintenant tu n’oublieras plus jamais de ta vie de vérifier que le câble tient vraiment
- Ouais mais je n’aime pas savoir qu’à cause de moi tu vas louper l’exam d’après-demain et que ça va peut-être mettre en l’air ta carrière
- Ne t’en fais pas pour moi, je serais à cet examen après demain
- Avec un genou dans cet état ? Le doc ne te laissera jamais courir
- Je n’ai pas passé les quinze dernières semaines à me forger militaire et mec pour laisser tomber maintenant. Je serais à cet examen et je ferais mon maximum. Si ce n’est pas suffisant, tant pis. »
Deux jours plus tard, Julia se présenta effectivement à l’examen en boitant sacrément. Elle avait pu négocier avec le médecin pour avoir des calmants qui l’aideraient à tenir le coup mais il avait largement désapprouvé son geste. Comme annoncé par les formateurs, l’examen était corsé et vers la mi-parcours, les calmants ne furent plus suffisamment effet pour lutter contre la douleur au genou de Juliane. Sa lenteur pour se mettre à couvert lui fit hériter d’un tir ennemi à la jambe. La bille de peinture laissa une flaque bleutée sur son treillis bleu marine. En position vulnérable elle se révélait à présent une proie facile. Le secours vînt du côté droit. Les collègues de la jeune femme positionnés à des points stratégiques couvrirent le dénommé Dean qui s’avança jusqu’à Juliane pour la tirer par le col à couvert.
« Tu vas l’avoir ton exam ma belle ! » lui glissa-t-il à l’oreille avant de se redresser et dégommer un membre de l’équipe adverse.
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Julia avançait dans les couloirs de la CIA en suivant un agent qui l’avait accueilli à l’entrée du bâtiment. Il avait prétendu s’appeler Cooper mais la jeune femme ne pensait pas qu’il se nommait réellement ainsi. Les bureaux qu’elle pouvaient apercevoir derrière des vitres ressemblaient à ceux du FBI, les vitres et la multitude d’écrans allumés en plus. Les deux s’arrêtèrent devant une porte où Cooper lui fit comprendre que c’était leur destination. Il sortit une carte à puce, la passa dans un lecteur, tappa un code à 6 chiffres et la porte se déverrouilla. Des voix se firent entendre de plus en plus fort à mesure qu’ils approchaient de la fin du sas menant à une salle de réunion. Juliane tendit un peu l’oreille pour écouter ce qu’il se disait. Cela pourrait peut-être se révéler utile par la suite.
ALLAN : “Allons John cesse de râler, on t’a trouvé un petit colis, tu m’en diras des nouvelles...”
JOHN : “Quelle greluche es-tu encore allé me dégoter ?”
ALLAN : “Une grande blonde avec des yeux de tigresse et une plastique tout à fait respectable... Tu ne me croiras jamais mais elle du FBI et elle vient tout droit du SWAT, ”
JOHN : ”Du SWAT ? Un bien masculine dans le genre... Yeurk ! Mensurations ?”
ALLAN : ”Je dirais 90 60...”
JULIANE : ”88”
Allan et John se retournèrent d’un seul homme et dévisagèrent la blonde en se demandant à présent depuis combien de temps elle était arrivée.
ALLAN : ”Justement quand on parle du loup ! Bienvenue à la CIA Miss Llew... C'est quoi votre petit nom déjà ?”
JULIANE : ”Llewelyn”
ALLAN : “Voilà c’est cela. Voici l’agent John Moorcraft, il sera votre partenaire pendant la mission, John voici Juliane Llewelyn”
JOHN : ”Enchanté Miss Llewelyn... Votre nom n’est pas très commun, de quelle origine est-ce ?”
JULIANE : ”Inutile d’aggraver votre cas Agent Moorcraft en faisant ami-ami. Je ne suis pas greluche à ce point”
ALLAN : ”Ow... Vous étiez déjà là à ce moment là... Parfait !”
JULIANE : ”On pourrait peut-être essayer d’en finir ? J’ai d’autres choses à faire de ma matinée”
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JOHN : ”So... Cela fait bientôt deux heures que nous avons décollé et vous n'avez pas desserré les mâchoires, on pourrait peut-être essayer de briser la glace vous ne croyez pas ? Sinon les six heures de vols restantes risquent d'être longues”
JULIANE (levant la tête de son magazine): "Personnellement, je ne m'ennuie pas... Cette revue a beau être un torchon de bêtises, je la lirais jusqu'au bout en m'efforçant de la trouver passionnante. Et puis vous ne voulez vraiment pas que je commence à jouer la vraie greluche...”
JOHN (un peu embarrassé) : ”Ecoutez Miss, je suis désolé que vous ayez eu à entendre ça, ce ne sont que des plaisanteries, de mauvais goût je vous l'accorde mais je ne suis pas vraiment du genre à travailler en duo et avec une femme de surcroît. ”
JULIANE : ”Ecoutez Agent Moorcraft, quand j'ai effectué ma formation au SWAT j'étais la seule femme du groupe. Donc les réflexions déplacées et tout le reste j'ai donné. Mais il y a une différence entre la plaisanterie et le manque de respect. Je passe outre le premier mais pas le second. Alors que vous essayiez de vous donner un genre devant votre boss c'est votre problème mais je ne suis pas un morceau de viande qu'on expose ou ni une potiche sans cervelle. Et ne vous fiez pas à ma belle gueule car je vous ferais manger les testicules par les narines si vous vous avisez à vous montrer aussi vulgaire à mon égard une fois de plus. Compris ?”
JOHN (avec un petit sourire) : ”Je tâcherais de m'en souvenir. Vous savez que vous êtes terriblement craquante quand vous essayez de jouer les rebelles ?”
JULIANE : ”Vous voulez une petite démonstration ?”
JOHN : ”Après la mission pourquoi pas ?! Je serais ravi de voir ça”
JULIANE (avec un sourire et haussement de sourcil): ”Prétentieux !”
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Julia arriva à Woodland Park où John lui avait donné un rendez-vous pressé une vingtaine de minutes plus tôt. C'est un peu nerveuse qu'elle arriva sur les lieux car elle avait aussi quelque chose d'urgent à annoncer à l'agent de la CIA. Elle le trouva debout près d'un banc à regarder l'heure sur sa montre. C'était celle qu'elle lui avait offerte pour son anniversaire six mois après le début de leur relation. En se rapprochant de lui, elle put constater sa mine tendue et impatiente. Arrivée à sa hauteur elle eut un élan vers lui, pour l'embrasser mais aussitôt Moorcraft eut un mouvement de recul.
JOHN : "Ne prends pas cette peine"
JULIANE : "Je te demande pardon ? Je voulais juste t'embrasser. Qu'est-ce qui ne va pas ?"
JOHN : "C'est toi qui ne va pas ! Toi, Nous, tout. Y'a rien qui ne va. J'arrête la comédie, je mets un terme à notre relation"
JULIANE : " Attends une minute, qu'est-ce qui te prend là ? ça te prends comme ça, du jour au lendemain"
JOHN : "Toi et moi ça ne peut pas marcher..."
JULIANE : "Oh et il t'a fallu trois ans pour t'en rendre compte ?"
JOHN : "Tu sais ce que c'est, on fait tous des erreurs"
JULIANE : "Des erreurs ? Attends je crois que j'ai raté un épisode.."
JOHN : "Tu as plutôt carrément raté tout le film, tu ne croyais quand même pas que j'étais tombé amoureux de toi ? Tu t'es vue ? Tu m'as bien regardé ? Notre histoire c'est du vent, une pièce montée de toute part par la CIA. Tu ne nous sers plus à rien maintenant et je suis ravi que ce soit enfin terminé."
JULIANE: "Tu mens, tu n'as jamais su me mentir auparavant et tu n'as toujours pas fait de progrès en la matière. C'est quoi le plan ?"
JOHN : "Il n'y a pas de plan, n'essaie pas de te raccrocher un à un quelconque espoir, c'est terminé. Je reprends ma liberté. Je te laisse jusqu'à demain soir pour vider mon appartement de tes affaires avant que je ne fasse changer la serrure.
JULIANE : "Tu es en train de faire la plus grosse connerie de toute ta vie."
JOHN : "Ne te donne pas tant d'importance, il y a beaucoup mieux que toi dans le coin... Bien je pense qu'on en a terminé et comme je n'ai pas envie de te voir chialer parce que je vais me sentir obligé de devoir te donner un mouchoir en papier je te dis adieu ! Il ne m'en reste plus qu'un dans mon paquet et j'ai le nez qui coule alors tu comprends bien que je vais le garder pour moi, allez Ciao !"
Et sans autre forme de procès il se mit en marche et laissa la blonde en plan. Sous le choc Julia n'eut pas la présence d'esprit de le retenir et s'assit sur le banc en bois. L'agent du FBI se refusait à croire ce qu'il venait de se passer. Cela semblait tellement irréel. C'était trop soudain pour être vrai. Leur couple fonctionnait à merveilles, ils avaient des projets ensemble comme celui de fonder une famille. Cela faisait quatre mois qu'ils essayaient de faire un enfant et le jour où il lui annonçait leur rupture, Julia elle venait lui apprendre qu'ils avaient enfin réussi...
JOHN (en décrochant son téléphone): "Moorcraft !"
ALLAN : "C'est fait ?"
JOHN : "Oui..."
ALLAN : "ça va aller ?"
JOHN : "Comme elle l'a dit, je viens de faire la plus belle connerie de ma vie. Je vais à l'aéroport, je te recontacte quand on sera à destination"
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CHARLINE: "Toc toc ? On peut entrer ?"
Julia leva la tête pour identifier son interlocutrice. Elle connaissait cette voix et sourit en reconnaissant le visage de sa coéquipière et de sa bleue, Penny. Les deux femmes entrèrent dans la pièce avec un énorme panier garni qu'elles présentèrent fièrement à la nouvelle maman.
CHARLINE : "C'est de la part de tout le monde"
JULIANE : "Ow merci les filles c'est super gentil..."
PENNY : "Bon on peut poser ça maintenant ? ça pèse une tonne!"
Les deux jeunes femmes posèrent le paquet sur une table et s'approchèrent du lit d'hôpital pour pouvoir voir à quoi ressemblait la petite bouille que Julia avait mis au monde deux jours plus tôt.
CHARLINE : "Oooow regardez-moi cette petite tête toute mignonne..."
PENNY : "Alors tu lui as trouvé un nom ?"
JULIANE : "Pas encore. J'avais plein d'idées avant d'accoucher mais là je ne sais plus trop"
PENNY : "Penelope"
JULIANE : "Tu es gentille mais j'ai assez d'un bébé nommé comme ça à m'occuper pour ne pas en avoir une deuxième"
PENNY : "Ah ah ah, très drôle"
CHARLINE : "Et là comme ça au hasard il n'y a rien qui te vient ?
JULIANE : " J'ai envie qu'elle ait un nom un peu spécial comme le mien. Je pense que vous allez me regarder bizarrement si je vous le disais..."
PENNY : "Propose toujours, après tout c'est toi qui décide"
JULIANE (avec la prononciation correcte) : "Okay... Je me souviens qu'il y avait Meriel, Maelona, Aingeal, Siwan, Eiria ou Eirianwan... Mh.. Je crois qu'il y avait Deryn aussi. J'aime bien Siwan mais une fois traduit ça donne Joan..."
CHARLINE : "Mouais tu peux oublier celui là... Mais plus sérieusement, tu ne pourrais pas trouver plus simple ? Imagine que ta gamine va grandir et qu'elle va aller à l'école. Tu sais les gamins maintenant ne sont pas tendres entre eux."
PENNY : "Et Maelona ça veut dire quoi ?"
JULIANE : "Eh bien si je me souviens bien, ça signifie "divine princess"."
PENNY : "Ben voilà ! Tu l'as ton nom !"
CHARLINE : "Pour une fois notre petite bleue n'a pas tort..."
JULIANE : "Je ne sais pas, maintenant que je pense à cette histoire d'école je me dis que pour un premier prénom ce ne serait peut-être pas judicieux... Mais je le garde en mémoire. Je me dis que Eileen passerait peut-être mieux en premier. Enfin bref je ne sais pas."
CHARLINE : "Bon allez Penny, va me chercher un café au Starbucks au coin de la rue et prends un chocolat pour Julia"
PENNY : "Tu n'as qu'à dire tout de suite que tu veux que je m'en aille"
CHARLINE : "Non seulement ça et je veux un café alors si tu ne veux pas une mauvaise appréciation sur ton évaluation mensuelle je te conseille de te dépêcher"
PENNY : "ça c'est vraiment..."
CHARLINE : "Injuste ? Non normal ! Si tu veux passer à notre niveau je te garantis que tu vas encore devoir nous en servir des cafés... Allez hors de ma vue avant que ma commande ne s'allonge"
La jeune femme prit ses affaires en maugréant dans sa barbe et partit chercher la commande de sa supérieure.
JULIANE : "Tout en finesse..."
CHARLINE : "On a la paix c'est le principal non ? Et puis je voulais pouvoir parler librement. Comment tu te sens vraiment ?"
JULIANE : "A vrai dire je ne sais pas. Je réalise encore mal que c'est bien moi qui l'ait mise au monde, que je suis mère à présent. J'ai encore plus la trouille qu'avant. J'ai peur de mal faire, de la blesser, de ne pas lui apporter de dont elle aura besoin... J'ai grandi sans parents alors je ne suis pas bien sûre de savoir comment m'y prendre"
CHARLINE : " C'est normal mais rien que le fait de te poser toutes ces questions est une bonne chose. Tu ne pourras pas tout réussir du premier coup mais mon grand-père disait que c'est en forgeant qu'on devient forgeron."
JULIANE : "Peut-être... Je me dis aussi que j'aurais peut-être dû interrompre ma grossesse quand j'en avais l'occasion."
CHARLINE : "Ne dis pas une chose pareille enfin ! Tu l'as voulu cette petite et subir tes folies de femme enceinte a été l'un des trucs les plus funs qu'on n'a jamais vécu ensemble... "
JULIANE : "Disons que j'ai un peu peur de son départ dans la vie... Une mère "bleue" et sans père... Je ne sais pas si c'est lui assurer un avenir radieux"
CHARLINE : "Cesse donc de te faire du mal, tu n'es ni la première, ni la dernière mère célibataire du pays. Tu feras comme toutes les autres avant toi : de ton mieux. Ne te mets pas une pression inutile sur les épaules. Pour le moment à part lui donner à manger et la changer ton rôle de mère va être plutôt basique. Il faut juste que tu t'adaptes. "
JULIANE : "Tu dois avoir raison"
CHARLINE : "Mais bien sûr que j'ai raison ! Comme d'habitude"
JULIANE : "Non d'habitude c'est moi qui ait raison... Tu as souvent tort"
CHARLINE : "C'est bien ce que je dis"
JULIANE : "Je te remercie pour le soutien moral"
CHARLINE : "Mais de rien ma vieille ! Faut bien que je m'occupe un peu de toi si je veux encore traquer du criminel avec toi"